Crise du Covid-19 à Monaco : le point du Conseil National après les deux premières réunions du Comité Mixte de Suivi avec le Gouvernement
Instauré par l’Ordonnance Souveraine du 27 mars dernier, le Comité Mixte de Suivi Covid-19 s’est déjà réuni deux fois durant cette semaine qui s’achève : lundi 30 mars et vendredi 3 avril. Les échanges ont été constructifs et ont permis de constater que le Gouvernement et le Conseil National partageaient déjà certaines approches au sujet des mesures prises ou à prendre. Sur d’autres points, les discussions ont permis de rapprocher les positions des deux institutions, pour aboutir à des mesures consensuelles. Mais sur certains dispositifs, les discussions se poursuivent encore, certaines mesures font débat et parfois l’objet de divergences. Pour autant, ces réunions ont déjà abouti à des avancées majeures concernant les décisions prises par le Gouvernement, dans un esprit d’union nationale entre l’Exécutif et le Conseil National.
Le Conseil National, comme ressource institutionnelle des membres du Gouvernement, transmet les attentes légitimes et concrètes de la part des Monégasques et des Résidents.
L’objectif de la délégation conduite par le Président Stéphane Valeri, est de rendre le plus efficace possible l’ensemble des dispositifs de lutte contre le Covid-19. Il s’agit non seulement de rassurer, mais aussi de soutenir rapidement et dans les faits l’ensemble des acteurs de notre économie, directement impactés par cette situation sans précédent.
Pour résumer : il faut une traduction rapide et perceptible par tous, des décisions prises suite à ces échanges.
I – Sur le plan sanitaire et concernant le confinement actuel
Les points d’accord et de convergence :
– La stratégie d’un recours massif aux masques et aux tests de dépistage est validée (en priorisant d’abord les populations les plus exposées et en généralisant le plus possible leur utilisation).
Les élus ont encouragé la diversification des sources d’approvisionnement (des contacts complémentaires ont été remis par la délégation). Toutes les pistes doivent être étudiées, puis coordonnées pour des livraisons rapides et massives sur le terrain.
Il y a urgence ! Il s’agit d’un changement de stratégie majeur, partagé par nos deux institutions.
– Par ailleurs, le Gouvernement a entendu la demande de renforcement des contrôles aux frontières. Aucune voiture hors Monaco ne doit pouvoir entrer en Principauté, pour des motifs autres que le travail ou une raison médicale. Il n’est pas normal par exemple que des résidents au-delà des communes limitrophes viennent encore s’approvisionner à Monaco dans les surfaces alimentaires.
Les points qui font débat :
– Le Conseil National pense qu’il faut renforcer les contrôles en ville pour faire respecter davantage la stratégie du confinement. Devant certains comportements et certains abus, il faut envisager de mettre en place des sanctions sous forme d’amendes.
– Le Conseil National a demandé l’arrêt de tous les chantiers. Les chantiers qui se poursuivent sont donc de la responsabilité unique du Gouvernement. Les élus estiment en effet que la protection sanitaire de la population est plus importante que tout et regrettent que certains chantiers continuent ou même aient repris, comme le chantier public du complexe balnéaire du Larvotto. Les résidents ne comprennent pas, alors qu’ils subissent un confinement, que des chantiers continuent sous leur fenêtres avec de nombreux ouvriers.
II – Dans le domaine social
Les points d’accord et de convergence :
– La mise en place du Chômage Total Temporaire Révisé (CTTR). Tous les salariés dont le travail est suspendu, bénéficient de 80% environ de leur salaire net, jusqu’à un plafond fixé à 4,5 fois le SMIC monégasque. Pour les salaires inférieurs ou égaux à 1800 euros nets mensuels, 100 du salaire est maintenu.
– La mise en place d’un Revenu Minimum Exceptionnel (RME) pour les travailleurs indépendants. Son montant sera de 1800 euros mensuels nets.
– Le personnel de maison pourra également bénéficier du CTTR.
– Le principe d’une prime pour les soignants du CHPG et des établissements rattachés (A Qietudine, Cap Fleuri et Centre Rainier III), le corps des sapeurs-pompiers et les unités de secours.
– L’interdiction des licenciements (sauf pour faute grave), pendant toute la durée de la crise. Vu le dispositif du CTTR, prenant en charge en totalité la masse salariale des personnes concernées, il n’y a aucune raison pour qu’un employeur procède actuellement à un licenciement, mettant en grande difficulté sur le salarié qui en serait victime. C’est pourquoi le Conseil National votera une proposition de loi ce lundi 6 avril, pour donner un cadre légal à la décision ministérielle prise par le Gouvernement, et pour permettre de sanctionner les abus (ce que ne permet pas la seule décision ministérielle).
– L’obligation du télétravail pour tout poste le permettant, durant la durée du confinement. Le Conseil National votera ce lundi 6 avril une proposition de loi, pour là encore donner un cadre légal à la décision ministérielle.
Ce qui fait débat :
– Pour des raisons sociales, le Conseil National avait proposé dans sa résolution du 19 mars, de prendre le salaire médian (2200 euros nets mensuels environ) comme plafond de prise en charge à 100% du salaire, concernant le CCTR. Il est en effet compliqué pour certains de ces foyers de faire face à leurs charges fixes (loyers, échéances de crédits…).
– Concernant le RME, le Conseil National aurait souhaité qu’il soit de 2200 euros (équivalent au salaire médian). Il demande que le dispositif soit élargé aux dirigeants des SARL, pour le moment injustement écartés de cette mesure. Seule la forme juridique change, mais les difficultés sont les mêmes que pour les travailleurs indépendants et les activités en nom personnel.
– La durée de la prime pour les personnels soignants du CHPG et des établissements rattachés, le corps des sapeurs-pompiers et les unités de secours. Le Conseil National souhaite une prime de 1000 euros mensuels, tant que durera la crise.
– La discussion se poursuit concernant l’élargissement de cette prime mensuelle aux personnels soignants des établissements de l’IM2S et du Centre Cardio-Thoracique, ainsi que du Centre privé d’Hémodialyse.
– La discussion se poursuit pour définir précisement le périmètre de la prime exceptionnel de 1000 euros, qui pour le Conseil National devrait concerner également tous les fonctionnaires qui ont obligation de travaukker sur site et qui s’exposent donc pour assurer la continuité des services de l’Etat. Elle doit également concerner tous les personnels administratifs et non-soignants des établissements de santé.
– Les élus demandent également qu’une gratification soit accordée aux personnels des sociétés concessionnaires de services publics qui s’exposent également, par les sociétés elles-mêmes : SMA, SMEG, SME, Compagnie des Autobus.
III- Mesures économiques
Les points d’accord et de convergence :
– La dotation de 50 millions d’euros d’un fonds de garantie de prêts bancaires (sans coût pour l’emprunteur), qui doit bénédicier à toutes les entreprises qui ont besoin de trésorerie pour surmonter leurs échéances. Ce prêts bonifié est garanti par l’Etat, il n’y a donc aucun risque pour les banques. C’est pourquoi le Conseil National demande à toutes les banques de simplifier les procédures au maximum, d’accélérer le traitement des dossiers et de libérer les sommes au plus vite.
– La création d’un Fonds d’Intervention d’Urgence doté de 150 millions d’euros, proposé par le Conseil National, a été accepté par le Gouvernement lors de la seconde réunion du Comité Mixte : il s’agit de mettre en place des aides directes et d’injecter du « cash » pour soutenir l’économie monégasque mais les prêts ne suffiront pas pour toutes les entreprises et vont alourdir leur endettement. Certaines entreprises et certaines secteurs particulièrement impactés, ont besoin d’aides publiques pour faire face à leurs charges incompressibles. L’objectif est d’éviter au maximum les faillittes et les licenciements, pour passer le cap de la crise et se préparer à la relance de l’économie monégasque.
– Les loyers domaniaux pour les commerces sont supprimés pendant un trimestre pour tous.
– Le report des charges sociales et fiscales, sur demande, pour un trimestre.
Ce qui fait débat :
– Pour le Conseil National, la durée de remboursement de prêts, actuellement d’une année, est beaucoup trop courte vu l’ampleur de la crise. les élus demandent un étalement sur 5 ans.
– Le Conseil National demande la prise en charge par l’Etat des cotisations CAMTI-CARTI pendant un trimestre, sur demande et tant que durera la crise.
– Le Conseil National demande l’extension de la suppression des loyers domaniaux pour les travailleurs indépendants et les bureaux des sociétés impactées par la crise.
– Estimant que chacun doit participer à l’effort pour surmonter cette période difficile, et prenant en exemple celui consenti par l’Etat, le Conseil National demande à ce que les bailleurs privés de locaux à usage professionnel, procèdent à des baisses de loyer et permettent leur mensualisation, le temps de la crise. Une proposition de loi imposant un minimum de 20% de baisse, et l’étalement de 30% sur le reste de l’année, sera votée en ce sens ce lundi 6 avril. Le Conseil National constate avec satisfaction que d’importants bailleurs privés ont devancé cette mesure en appliquant eux-mêmes des diminutions de loyers commerciaux bien supérieures. notre proposition fixe donc un minimum obligatoire pours tous, mais s’entend également comme un encouragement à soutenir l’ensemble des commerces et des acteurs économiques de la Principauté.
La prochaine réunion du Comité Mixte de Suivi aura lieu ce jeudi 9 avril.
L’ensemble de ces mesures modifiants en profondeur la loi de budget, le Gouvernement va déposer sous quelques jours un premier projet de loi budget rectificatif. Le Conseil National va l’examiner en urgence pour le voter en séance publique dès la mi-avril.