Stéphane Valeri réélu Président à l’unanimité des Conseillers Nationaux

Discours de Stéphane Valeri, Président du Conseil National, lors de la séance publique du renouvellement du Bureau le 6 avril 2020


 » Monsieur le Ministre d’Etat,

Madame, Messieurs les Conseillers de Gouvernement – Ministres,

Chers Collègues,

Chers Compatriotes, Chers Résidents,

Chers amis de la Principauté qui nous suivez en cette fin de journée,

Avant de revenir sur les raisons de cette nouvelle séance si particulière et sur le contexte dans lequel nous la tenons, je tiens à vous exprimer, mes Chers Collègues, à vous tous, à chacune et à chacun d’entre vous, mes plus sincères remerciements pour votre vote unanime, dans le sens de l’union nationale que nous avons mise en œuvre ensemble.

Cette union nationale, elle était naturelle, nécessaire et je dirais même indispensable pour faire face, tous unis au Conseil National, à la grave crise que nous traversons. Devant l’ampleur de cette épreuve pour notre pays, il était logique et décisif que les élus dépassent les clivages politiques, en ne pensant qu’à l’intérêt du pays.  Ainsi, c’est l’ensemble des élus des Monégasques qui travaillent ensemble pour formuler des propositions constructives et opérationnelles. Nous nous réunissons presque tous les jours depuis le début de cette crise, en groupe restreint, avec les conseillers nationaux membres de la délégation du comité mixte de suivi, pour que cette union nationale se traduisent dans les faits par une coordination de nos positions communes, et par une communication qui parle d’une même voix.

Comme vous l’avez peut-être déjà constaté lors de la séance exceptionnelle du 19 mars dernier, nous nous imposons naturellement le respect de règles strictes : il s’agit donc d’une séance sans public, et avec un respect de la distanciation entre tous les participants. C’est pourquoi l’attribution des places des conseillers nationaux et des membres du Gouvernement a été bouleversée pour beaucoup.

Je voudrais adresser mes salutations très chaleureuses à nos doyens d’âge, restés chez eux pour des raisons évidentes liées à leur âge.

Le 19 mars, nous apprenions que notre Prince Souverain avait été testé positif au Covid-19. Il y a quelques jours, c’est avec beaucoup de joie que nous avons pris connaissance de son complet rétablissement et de sa guérison. Monsieur le Ministre, vous avez également subi les conséquences de ce virus, et c’est pourquoi je vous souhaite une bienvenue toute particulière ce soir dans cette enceinte. Nous nous en réjouissons tous.

Je l’ai dit, l’union nationale est de mise au sein de notre Assemblée. Et face à cette crise, l’Etat a aussi besoin de l’unité de ses institutions. Le Prince l’a rappelé très justement dans un récent communiqué, je le cite : « le Conseil National a sa place dans le dispositif de lutte contre cette épidémie ».

Le Conseil National est en effet – et encore plus en de pareilles circonstances – une ressource institutionnelle pour le Gouvernement. Nos deux institutions ne sont pas de même nature. Le Gouvernement est nommé par le Prince et composé de hauts fonctionnaires. Le Conseil National lui est élu par les Monégasques. En tant qu’assemblée représentative, il exprime les attentes et les besoins légitimes de la population. La force de nos institutions, c’est de fonctionner chacun dans son rôle, mais dans la concertation. Depuis le début de ce mandat, de grandes avancées ont été accomplies ensemble, sous l’autorité du Prince, par exemple en matière de logement, mais aussi sur les questions de société ou encore sur la préservation de notre qualité de vie.

Oui, avec cette crise historique, l’unité des institutions était plus que jamais nécessaire. Le temps n’est pas aux luttes d’égos, aux polémiques ou aux crispations institutionnelles qui n’ont pas lieu d’être, puisque nous sommes tous attachés à notre Prince Souverain et fidèles à la Monarchie Constitutionnelle. Cet attachement, il sera réaffirmé ce soir par une résolution de notre Assemblée, afin de le graver dans le marbre.

Par l’Ordonnance Souveraine du 27 mars dernier, un Comité Mixte de Suivi #Covid19 a donc été instauré entre le Gouvernement et le Conseil National. Celui-ci s’est déjà réuni deux fois la semaine dernière : les lundi 30 mars et vendredi 3 avril. Les échanges ont été constructifs et ont permis de constater que le Gouvernement et le Conseil National partageaient déjà certaines approches au sujet des mesures prises ou à prendre. Sur d’autres points, les discussions ont permis de rapprocher les positions des deux institutions, pour aboutir à des mesures consensuelles. Mais sur certains dispositifs, les discussions se poursuivent encore, certaines mesures font débat et parfois l’objet de divergences. Pour autant, ces réunions ont déjà abouti à des avancées majeures concernant les décisions prises par le Gouvernement, dans cet esprit d’unité entre l’Exécutif et le Conseil National.

Le Conseil National, comme ressource institutionnelle du Gouvernement, transmet les attentes légitimes et concrètes de la part des Monégasques et des Résidents. 

L’objectif de notre délégation est de rendre le plus efficace possible l’ensemble des dispositifs de lutte contre le Covid-19. Il s’agit non seulement de rassurer et protéger l’ensemble de la population, mais aussi de soutenir rapidement dans les faits tous les acteurs de notre économie, directement impactés par cette situation sans précédent.

Avant de dresser un état des lieux synthétique des positions de notre délégation et des échanges entre nos deux institutions au sein de ce Comité Mixte, permettez-moi de m’arrêter quelques instants sur les raisons de cette séance législative qui intervient en ouverture de cette session de printemps.

Devant cette crise, nous sommes tous face à l’urgence. C’est pourquoi la procédure d’urgence accompagne le vote de deux projets de loi du Gouvernement permettant, pour l’un la suspension des délais administratifs, et pour l’autre de prendre des dispositions relatives à la justice pour faire face à la pandémie.

Notre collègue Thomas Brezzo, président de la commission de législation, y reviendra toute à l’heure en tant que rapporteur de ces deux projets de loi.

Nous voterons également deux propositions de loi du Conseil National. La première vise notamment à interdire les licenciements abusifs et à rendre obligatoire le télétravail sur les postes le permettant, pendant la durée de la crise. Elle donnera un cadre législatif, qui permettra à l’Etat de sanctionner les contrevenants et d’appuyer les décisions ministérielles. La seconde porte sur diverses mesures en matières de baux à usage commercial, industriel ou artisanal et de baux à usage de bureau. Dans un contexte où tout le monde doit se montrer solidaire et uni pour permettre à notre économie de surmonter cette crise, les conseillers nationaux demandent à ce que les bailleurs privés concernés, participent dans une mesure raisonnable à cet effort collectif. C’est dans l’intérêt de tous, et certains acteurs de l’immobilier professionnel et commercial, ont déjà consenti des efforts bien plus importants à leurs locataires impactés, que la diminution de loyer de 20% demandée par le Conseil National dans ce texte.

Un point à présent sur la situation à ce jour de nos positions et de nos échanges, entre nos deux institutions au sein du Comité Mixte de Suivi Covid19.

En matière sanitaire tout d’abord,  je voudrais dire ma satisfaction relative à la validation d’une stratégie de recours massif auxmasques et auxtests dedépistage, en priorisant d’abord les populations les plus exposées et en généralisant le plus possible leur utilisation.
Je ne veux pas regarder en arrière. Aujourd’hui nous le savons, plus le temps passe et plus c’est compliqué. Cette question est d’ailleurs devenue un véritable enjeu géopolitique. C’est pourquoi les élus ont encouragé la diversification des sources d’approvisionnement et ont remis des contacts complémentaires de fournisseurs. Toutes les pistes doivent être étudiées, puis coordonnées pour des livraisons rapides et massives sur le terrain. Je ne peux qu’encourager le Gouvernement et la DASA en particulier, à tout faire pour que notre pays puisse compter sur les volumes de masques et de tests dont il a besoin.

Concernant le confinement et la lutte contre la propagation du virus, le Gouvernement a entendu notre demande de renforcement des contrôles aux frontières. C’est chose faite de manière systématique depuis ce samedi. Aucune voiture hors Monaco ne doit en effet pouvoir entrer en Principauté, pour des motifs autres que le travail ou une raison médicale. Il n’était pas normal par exemple que des résidents au-delà des communes limitrophes viennent encore s’approvisionner à Monaco dans les surfaces alimentaires.

Le Conseil National note aussi avec satisfaction le renforcement des contrôles en ville pour faire respecter davantage la stratégie du confinement. Devant certains comportements et certains abus, il faut envisager de mettre en place des sanctions sous forme d’amendes. A ce stade, la question des attestations de déplacement temporaire se pose pour un contrôle efficace, notamment dans la perspective du prochain week-end de Pâques.

Et puis, il y a la question de la poursuite des chantiers. C’est un point de divergence important. Je rappelle que le Conseil National a demandé l’arrêt de tous les chantiers. Les élus estiment en effet que la protection sanitaire de la population est plus importante que tout et regrettent que certains chantiers continuent ou même aient repris, comme le chantier public du complexe balnéaire du Larvotto. La population qui est confinée ne peut comprendre, alors qu’elle doit faire de nombreux sacrifices, que se déroulent des chantiers sous ses fenêtres, avec les nuisances que l’on sait. Voilà, je n’en dirai pas plus, mais vous connaissez Monsieur le Ministre la position de notre Assemblée unanime.

Dans le domaine social, le Gouvernement a mis en place le dispositif du Chômage Total Temporaire Révisé (CTTR). Tous les salariés dont le travail est suspendu, bénéficient de 80% environ de leur salaire net, jusqu’à un plafond fixé à 4,5 fois le SMIC monégasque. Pour les salaires inférieurs ou égaux à 1800 euros nets mensuels, 100% du salaire est maintenu. Nous approuvons cette mesure vitale, même si pour des raisons sociales, le Conseil National avait proposé dans sa résolution du 19 mars, de prendre le salaire médian (2200 euros nets mensuels environ) comme plafond de prise en charge à 100% du salaire.

Nous partageons également sans réserve la mise en place d’un Revenu Minimum Exceptionnel (RME) pour les travailleurs indépendants. Son montant sera de 1800 euros mensuels nets. Le Conseil National demande que le dispositif soit élargi aux dirigeants des SARL, pour le moment écartés de cette mesure. Seule la forme juridique change, mais les difficultés sont les mêmes que pour les travailleurs indépendants et les activités en nom personnel.

En matière économique, Monsieur le Ministre, vous avez confirmé la création d’un Fonds d’Intervention d’Urgence doté de 150 millions d’euros, lors de la seconde réunion du Comité Mixte de Suivi : il s’agit de mettre en place des aides directes et d’injecter du « cash » pour soutenir l’économie monégasque. Nous le savons, les prêts bancaires ou les lignes de crédits, ne suffiront pas pour toutes les entreprises et vont alourdir leur endettement. Pour le Conseil National, la durée de remboursement de prêts, actuellement d’une année, est beaucoup trop courte vu l’ampleur de la crise. Les élus demandent un étalement entre 3 et 5 ans. De plus, pour obtenir ces premières aides, il faut simplifier les procédures au maximum pour permettre aux banques de débloquer des sommes le plus rapidement possible. Mais certaines entreprises et certains secteurs particulièrement impactés, ont aussi besoin d’aides publiques directes, pour faire face à leurs charges incompressibles. L’objectif est pour tous d’éviter au maximum les faillites et les licenciements, pour passer le cap de la crise et se préparer à la relance de l’économie monégasque. Nous aurons l’occasion d’y revenir jeudi prochain lors de la 3eme réunion de ce comité mixte, mais aussi lors du débat concernant le vote d’un premier budget rectificatif déposé aujourd’hui même.

Par ailleurs, nous sommes en phase avec les mesures prises par le Gouvernement concernant les loyers domaniaux pour les commerces, qui sont supprimés pendant un trimestre pour tous et avec le report des charges sociales et fiscales, sur demande, pour un trimestre également.

A ce stade, le Conseil National souhaiterait l’extension de la suppression des loyers domaniaux aux travailleurs indépendants et aux bureaux des sociétés impactées par la crise. Il demande aussi la prise en charge par l’Etat des cotisations CAMTI-CARTI pendant un trimestre, sur demande et tant que durera la crise.

Avant de conclure, je vous annonce ce soir la création de deux nouvelles commissions spéciales. L’une concernant la modification du règlement intérieur de l’Assemblée pour le mettre en conformité avec les recommandations du Conseil de l’Europe.

Je vous propose aussi la création au Conseil National, d’une commission spéciale pour l’analyse de la crise liée au Covid19. Dans un esprit d’union national, et en reconnaissance du travail qu’il fournit, je vous demanderai de bien vouloir en confier la présidence à notre collègue Jacques Rit.

Nous le constatons, la réponse de l’Etat est à la hauteur de l’enjeu, et nos deux institutions travaillent dans l’unité pour continuer de parfaire les dispositifs mis en œuvre par le Gouvernement. Je veux le dire ce soir, le Conseil National est aux côtés du Gouvernement.

Les élus sont unis, à vos côtés, dans l’unité de nos institutions et sous l’autorité du Prince Souverain.

Je ne peux terminer mon propos sans rendre un vibrant hommage à l’ensemble de nos personnels soignants qui sont actuellement en première ligne dans la lutte contre le virus. Que soient une nouvelle fois remerciés toutes celles et ceux qui sont mobilisés pour sauver des vies et pour protéger la population. Je voudrais remercier l’ensemble des personnels concernés du CHPG, du Centre Rainier III, du Cap Fleuri et de la Qietudine mais aussi de la Fondation Hector Otto, sans oublier ceux de l’IM2S, du Centre Cardio Thoracique et du Centre privé d’Hémodialyse. Je remercie aussi tous les fonctionnaires et agents de l’Etat et de la Commune qui sont mobilisés, comme les personnels des sociétés concessionnaires de services publics. Je n’oublie pas tous ceux qui oeuvrent aussi dans les commerces maintenus ouverts pour les besoins vitaux de la population. Toutes et tous assurent la continuité de la vie du pays. « Un grand merci du fond du cœur pour tout ce que vous faîtes pour Monaco ».

C’est dans la solidarité de tous, et dans l’unité, grâce aussi à la force de notre modèle économique et social monégasque, que sous l’autorité de notre Prince Souverain, nous parviendrons tous ensemble à surmonter cette crise.

Je vous remercie. « 

Finances et Économie Nationale
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